Divers

Espagne : le procès d’un commissaire ripoux

José Manuel Villarejo est un personnage sulfureux et influent qui s'est présenté mercredi 13 pour « corruption« , « extorsion » et même « appartenance à une organisation criminelle« . Il a enregistré des centaines de personnalités qu'il a extorquées. À ses côtés derrière la barre d'accusation, il y avait 26 autres prévenus, accusés d'être ses complices. « À moi seul, je peux combattre le pays. » C'est l'un des mots que les enquêteurs entendaient souvent de la part de l'ancien chef de la police José Manuel Villarejo. Sauf que cette fois, son impunité n'est plus infaillible.

Des politiciens impliqués

Plus de 30 enquêtes fédérales ont révélé l'implication d'une cinquantaine de personnalités politiques dans les crimes commis par José Manuel Villarejo. Les accusés avaient engagé le commissaire ripou en vue d'espionner leurs rivaux.

À cause de ses révélations, plusieurs élus de renom ont terni leur nom, comme l'ancien ministre de l'Intérieur de Mariano Rajoy, Jorge Fernandez Diaz. Le ministre conservateur est visiblement soupçonné d'avoir tenté de souiller les séparatistes catalans en créant de faux documents à leur encontre.

Villarejo ne s'est pas arrêté là. En 2018, il a publié une conversation destructive pour la députée et ancienne secrétaire générale du Parti Populaire (PP), Maria Dolores de Cospedal. En effet, elle lui demandait des informations confirmant la corruption de son parti.

L'ancien roi Juan Carlos est également tombé dans le piège du commissaire voyou. Son ancienne maîtresse Corinna zu Sayn-Wittgenstein a parlé de corruption impliquant l'ancien monarque dans l'un des nombreux enregistrements. Il est maintenant exilé aux Émirats arabes unis.

Maître chanteur imparable ?

José Manuel Villarejo, 70 ans, à la silhouette énorme et au crâne chauve caché éternellement par un béret, aurait pu avoir une carrière respectable de policier. Cependant, en 1983, sa trajectoire a complètement déraillé. Il s'est éclipsé pendant dix ans, avant de commencer une nouvelle vie d'extorsion.

Astucieux et patient, avec un sang-froid à toute épreuve, il utilise une méthode puissante pour établir son contrôle sur les couches supérieures de la société espagnole : garder une trace de chacun. Personne ne lui échappe : un célèbre journaliste, un magistrat, un homme politique, un grand patron et même le chef du service de renseignement Félix Roldán.

Maître chanteur imparable, Jose Manuel Villarejo réintègre le puissant département policier de la DAO en 1993, en tant que directeur adjoint opératif. Il scrute alors les bidonvilles de l'Espagne en guettant les opposants du gouvernement.

Personne ne semblait capable d'arrêter ce policier corrompu. Villarejo a même réussi à piéger le juge Garzon qui enquêtait sur les policiers corrompus qui menaient une guerre acharnée contre l'organisation basque ETA.

Avant son arrestation en 2017, Jose Manuel Villarejo avait réussi à se hisser au top de 46 sociétés en vue de masquer ses activités d'espionnage. Sa fortune, cachée dans des paradis fiscaux, s'élève à 25 millions d'euros.

Un pouvoir de nuisance sans limites

Faire chanter les politiciens locaux n'était pas suffisant pour un ripou comme Villarejo. Il a fini par tomber en essayant d'espionner Gabriel Obiang, l'un des fils du président guinéen.

Ses activités frauduleuses ont été mises à nu par un ex-agent secret. Ce dernier avait révélé une transaction secrète de 30 millions d'euros, entre le groupe pétrolier de Guinée équatoriale, GEPetrol et l'une des sociétés appartenant au policier ripou.

Malgré son arrestation, Villarejo ne cesse pas de nuire aux politiciens. En effet, il possède 40 térabits d'enregistrements et de dossiers compromettants pour des hautes personnalités au pouvoir. L'élite politique espagnole a de quoi avoir froid au dos !

Le policier corrompu continue de plaider son innocence. Villarejo assure avoir agi pour le bien de son pays. Selon ses dires, il s'agit d'un règlement de compte l'empêchant d'arrêter les politiciens corrompus.

En janvier 2022, le procès de José Manuel Villarejo aura lieu. Il risque une peine maximale de 109 ans de prison. Quant aux politiciens qu'il a espionnés et fait chanter, ils risquent un impact colossal sur leur réputation.