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Allemagne : Irmgard Furchner, ex-secrétaire du camp de concentration nazi de Stutthof jugée pour complicité de meurtre

La justice allemande s’apprête à prononcer son verdict dans le procès d’Irmgard Furchner. Cette femme serait responsable de la mort de 11 000 personnes. Le génocide a eu lieu dans le camp de concentration de Stutthof situé en Pologne. Malgré son âge très avancé, voulant fuir sa sentence, l’accusée a essayé d'échapper à la justice.

Une condamnation tardive

Furchner a tenté d'échapper à son procès prévu fin septembre. Elle avait quitté la maison de retraite de Quickborn où elle résidait. Par la suite, elle avait pris un taxi en direction de Hambourg. Quelques heures plus tard, elle a été arrêtée. La police l’a placée en garde à vue pendant cinq jours. On lui a ensuite mis un bracelet électronique au poignet. La dame de 96 ans était secrétaire dans un ancien camp nazi. Elle est accusée d’être complice dans les meurtres de 11 000 prisonniers.

Pour éviter tout incident de sécurité, le procès a été déplacé dans un entrepôt aménagé à la périphérie de la ville. En effet, cet événement a été hautement médiatisé et a suscité un intérêt considérable.

L'accusée a pénétré dans la salle en fauteuil roulant. Elle se couvrait la tête avec une large écharpe de soie et des lunettes de soleil sombres. Elle a été jugée par un tribunal pour mineurs en raison de son âge lorsque les crimes présumés ont été commis. En effet, lorsqu’elle a commencé à travailler pour le commandant Paul Werner Hoppe, elle n’avait que 18 ans. Durant le procès, elle n’a fait qu’une intervention pour confirmer son identité et sa situation maritale. Elle ne s’est pas montrée coopérative face aux questions du juge.

Le récit d’une page sombre de l’histoire

Née en 1925 sous le nom de Dirksen, Irmgard a joué son rôle dans la folie meurtrière des nazis. En effet, son poste de secrétaire en chef aurait inclus des tâches sanguinaires. Sa position administrative clé et la configuration compacte du camp lui donnaient accès à toutes les informations même les plus secrètes. Selon le chef d’accusation, elle semble avoir « contribué à l'ensemble de l'opération de mise à mort » dans le camp. Ses missions englobaient l’établissement des listes de transport de détenus envoyés à Auschwitz pour y être assassinés. Elle dictait également les ordres du commandant Hoppe et gérait toutes ses correspondances.

Le camp de Stutthof est témoin des horreurs commises par les généraux d’Hitler. L’une des pratiques particulièrement horrifiantes était de faire croire aux détenus qu’on allait prendre leur poids et leur taille. En réalité, les SS (escadron de protection) se déguisaient en médecins pour les abattre lâchement. Les corps étaient par la suite brûlés. On forçait également les victimes à pénétrer dans des chambres remplies de gaz toxique Zyklon B. Les cris de douleur des personnes piégées hantent encore les récits des rescapés. Il était donc inévitable que Furchner réalisait ce qui se déroulait sur son lieu de travail.

Son avocat a pourtant déclaré que sa cliente a pris ses distances par rapport aux partisans du fascisme. Il faut dire que cette dernière est considérée comme une héroïne par les partisans d'extrême droite, ceux qui nient l’Holocauste. Elle refuse toutefois de porter le chapeau pour les crimes des hauts fonctionnaires. Mais ceux-ci ne sont plus en vie pour en assumer leur responsabilité.

Un besoin de résilience

L’avocat de l’opposition, Christoph Rückel a représenté cinq co-plaignants des États-Unis, de France et d'Autriche. Il a déclaré avec émotion que l'un d'eux venait de décéder récemment. Le dernier aveu de cet ancien détenu est qu'il ne parvenait toujours pas à « atteindre la ligne finale ». L'avocat a exhorté le tribunal de reconsidérer le rejet de sa demande d'organiser une visite du site commémoratif de Stutthof. Il considère qu’une inspection visuelle du site de tous ces crimes est essentielle. Ce serait le moyen d'apporter des traces et des preuves visuelles permettant de mieux comprendre la routine de Furchner à l’époque.

Furchner est la première femme à être jugée pour des crimes liés aux agissements nazis depuis des décennies. Il faut aussi savoir que le procès est filmé. Ce sera plus tard, un document historique précieux. Par ailleurs, un autre procès d'un ancien gardien de camp de concentration centenaire se déroule actuellement dans le Brandebourg. Au-delà d'une affaire judiciaire, c'est un puissant message qui reflète une réelle volonté de triompher des épisodes traumatiques du passé.