Pourquoi est-ce que j’ai un goût de métal dans la bouche ?

Qu'elle soit soudaine, temporaire ou persistante, cette sensation bizarre d'avoir un goût de métal dans la bouche n'est pas une vue de l'esprit et peut avoir de multiples causes. Ce trouble de la perception du goût aussi appelé paragueusie ou dysgueusie n'est pas à prendre à la légère surtout qu'il est souvent très désagréable. Et à moins d'avoir léché un morceau de métal ou une pièce de monnaie… cette sensation n'a rien de normal ou de naturel !

Comment fonctionne la perception des saveurs ?

Avant d'aller plus loin, il est important de comprendre le mécanisme général de la perception des saveurs. Pourquoi et comment peut-on ressentir une différence entre un goût sucré, salé, amer ou acide ? Comment peut-on ressentir que l'on a un goût de métal ? La perception du goût, l’un des cinq sens du corps humain est principalement liée à deux organes :

• La bouche, et plus particulièrement les papilles gustatives présentes sur la surface de la langue. Ces petites aspérités sont recouvertes de bourgeons du goût composés de centaines de récepteurs sensibles dits cellules gustatives.
• Le nez, ou plus exactement les cellules olfactives présentes sur les tissus de la cavité nasale. Elles sont environ 10 millions à tapisser l'épithélium intérieur du nez.

Leurs récepteurs sensoriels sont reliés neurologiquement et remontent l'information au cerveau. Si ce système fonctionne parfaitement, les goûts ressentis correspondent au type d’aliment consommé. Si ce n'est plus le cas ou qu'un goût désagréable de métal s'invite dans votre bouche, il est important d'en définir la cause pour pouvoir agir. Sur le plan anatomique, il est bon de noter que la fameuse carte du goût qui date du début des années 1900 n'est plus validée unanimement par la communauté scientifique et médicale. Si vous avez un goût de métal dans la bouche, ce n'est donc pas dû au fait que vous mangez plus sur une zone ou l'autre de la langue !

Goût de métal dans la bouche : les causes principales

Pour débuter sur une note rassurante, un goût métallique dans la bouche est rarement lié à une maladie chronique. Mauvaise hygiène bucco-dentaire, dérèglement hormonal, effet secondaire de la prise de certains médicaments… ses causes sont par contre nombreuses et parfois complexes à définir.

Un manque d'hygiène bucco-dentaire

Qu'il s'agisse d'un mauvais goût ou d'une mauvaise odeur (halitose), métallique ou non, le plus judicieux est toujours de regarder en priorité du côté de l'hygiène buccale. C'est en effet la cause principale mais surtout la plus simple à détecter et à traiter. Comme le recommandent les dentistes, commencez par vous brosser les dents au moins 2 fois par jour pendant 2 minutes minium avec un dentifrice fluoré et adoptez les bons gestes :

• Brossez-vous toujours de la gencive vers les dents en plaçant votre brosse à dents à 45 degrés.
• N'oubliez aucun espace de la bouche.
• Terminez par un nettoyage des interstices entre les dents avec du fil dentaire et pourquoi pas par un bain de bouche.

Utilisez une brosse à poils souples afin de préserver vos gencives et l'émail de vos dents et veillez à la changer dès qu'elle est abîmée ou au moins tous les 3 mois.

Une plaie, un saignement ou une affection bucco-dentaire

Pour rester dans la bouche, une mauvaise hygiène peut entraîner des caries ou une maladie des gencives voire évoluer vers des infections plus graves. Une plaie, un petit saignement ou une hémorragie buccale importante peuvent laisser un goût ferrugineux dans la bouche. Elles peuvent être liées à une blessure (auto-morsure, accident, chute…) ou faire suite à une chirurgie buccale ou ORL (extraction de dents de sagesse, amygdalectomie…).
Cette dysgueusie est liée au fait que le sang, et plus particulièrement l'hémoglobine (la protéine chargée du transport de l'oxygène) est composée en majorité de fer. Un saignement de nez peut également induire ce mauvais goût de fer. Voici également quelques exemples de maux qui peuvent provoquer un goût métallique dans la bouche.

• Gingivite ou Gingivite ulcéro-nécrosante aiguë (GUNA). Il s'agit d'une inflammation plus ou moins douloureuse et grave de la gencive qui devient rouge, gonfle et peut provoquer des saignements.
• Syndrome de la bouche brûlante ou glossodynie, une affection chronique intra-orale impliquant les muqueuses buccales et la langue.
• Angine de Vincent d'origine bactérienne (et non infectieuse ou virale) qui provoque des ulcérations des gencives et des saignements.
• Stomatites (inflammations de la bouche, ulcères…) légers ou sévères, localisés ou disséminés.
• Parodontite, une maladie d'origine bactérienne généralement liée à une gingivite mal soignée. L'affection qui attaque l'os de la mâchoire provoque une inflammation du parodonte (tissus autour de la dent) ainsi que des saignements.
• Cancer de la cavité buccale.

La prise de compléments vitaminés ou de médicaments spécifiques

Une « bouche métallique » est très souvent liée à un traitement médicamenteux ou plus particulièrement à certaines molécules entrant dans leur composition. C'est le cas par exemple du lithium qui modifie les récepteurs du goût et peut même bloquer les papilles gustatives. Consultez la rubrique « effets secondaires » mentionnée sur la notice des médicaments de votre armoire à pharmacie et vous allez être surpris d'y trouver bien souvent la dysgueusie et/ou l'halitose ! Les médicaments le plus souvent incriminés sont par exemple certains :

• Antibiotiques et plus particulièrement ceux contre la goutte ou le diabète.
• Antidépresseurs, anxiolytiques ou antipsychotiques contenant du lithium.
• Suppléments vitaminés riches en fer, zinc, cuivre ou chrome. C'est le cas par exemple, des vitamines prénatales ou de celles prescrites pour lutter contre l'ostéoporose.
• Antihypertenseurs, les médicaments utilisés contre l'hypertension artérielle (HTA).
• Antimycosiques ou antifongiques, prescrits pour traiter certaines maladies infectieuses causées par des levures ou des champignons microscopiques.
• Certains antihistaminiques entrant dans le traitement contre les allergies.
• Diurétiques prescrits pour traiter certains œdèmes ou maladies (insuffisance cardiaque, hypertension artérielle…). En augmentant la quantité d'urine, ces médicaments réduisent inévitablement le flux de salive et concentrent les goûts désagréables dans la bouche.
• Les thérapies de remplacement de la nicotine (TRN) peuvent également provoquer ce goût de métal dans la bouche. C'est d'ailleurs un symptôme annonciateur d'un surdosage de cette molécule toxique essentiellement responsable de la dépendance tabagique.
• Stéroïdes prescrits pour remédier à certains types d'impuissance (insuffisance gonadique…), de retard de puberté ou d'amaigrissement lié à des pathologies particulières (sida…). Certains sportifs les utilisent également alors que ces produits aussi appelés anabolisants sont classés comme dopants par l'Agence mondiale anti-dopage.

Certains médicaments contre les troubles de la prostate, le diabète, les crises d’épilepsie, le glaucome… ainsi que des produits entrant dans les traitements lourds (chimiothérapie…) ont également le même effet.

Le goût métallique peut être lié aux principes actifs qui modifient le fonctionnement des récepteurs du goût ou aux excipients présents dans la formule de certains médicaments. D'une manière générale, toutes les vitamines ou médicaments contenant des métaux ou des oligo-éléments métalliques en plus ou moins grande quantité peuvent provoquer un goût ferrugineux.

Modification hormonale : grossesse, hypothyroïdie…

Il n'est pas rare d'avoir un goût métallique dans la bouche en début de grossesse alors que toutes les hormones s'affolent. Cette sensation désagréable qui arrive bien souvent avec les nausées matinales s'atténue au fil des mois et disparaît généralement après l'accouchement ou la période d'allaitement.
L'hypothyroïdie, un déficit de production d’hormones thyroïdiennes (métabolique ou lié à surconsommation d'iode) peut également provoquer un goût de cuivre en bouche.

Infections des sinus ou des voies respiratoires

Les infections des voies aériennes hautes, des sinus, de la gorge ou de l'oreille moyenne (tympan, cavité contenant les osselets…) peuvent induire un goût métallique ou fumé dans la bouche. C'est d'ailleurs l'un des symptômes d'une sinusite (aiguë ou chronique), d'un rhume, d'une rhinite allergique ou encore d'une infection par le Sars-Cov-2 (Covid-19). Cette anomalie du goût qui arrive bien souvent après celle de l'odorat se rencontre également dans les cas d'hypertrophie aiguë des cornets ou de déviation de la cloison nasale.

Une allergie alimentaire spécifique

Certaines allergies déclenchées par des aliments particuliers peuvent perturber la perception gustative. Le goût de métal est souvent lié à l'histamine, la substance libérée par le corps pour répondre à l'allergène. Vous avez la bouche métallique après avoir consommé des produits très allergènes comme les œufs, les cacahouètes, les noix ou les fruits mer ? Et si vous y étiez tout simplement allergique ? Ne restez pas insensible à ce signe afin de ne pas risquer une anaphylaxie (réaction généralisée dans 5 % des cas) voire un choc anaphylactique au pronostic vital. Le goût métallique est d'ailleurs l'un des premiers signes annonciateurs de l'anaphylaxie bien avant les autres symptômes (difficultés respiratoires graves, gonflement…).

Le tabagisme

Au-delà d'une classique halitose bien connue des grands fumeurs, une surdose en nicotine peut également entraîner un goût métallique dans la bouche. Elle est d'ailleurs également rencontrée chez les personnes porteuses de patchs à la nicotine ou chez celles qui surconsomment de la Gomme à mâcher pour arrêter de fumer.

Une carence en vitamines

D'importantes carences en vitamine B12, une molécule primordiale pour le fonctionnement du système nerveux peuvent être mises en cause dans la sensation de goût métallique. Il en est de même pour les carences en certains oligo-éléments comme le Zinc ou le Fer.

Une exposition à des produits particuliers

L'exposition, la consommation ou l'inhalation excessive de certains produits chimiques contenant du plomb ou du mercure peuvent entraîner un goût de métal dans la bouche. Ce symptôme peut être associé à des nausées, une irritation de l'épiderme ou encore des soucis respiratoires. Il peut s'agir d'une exposition professionnelle (usine pétrochimique, centre de traitement de déchets mercuriels…), domestique (ancienne peinture murale, batteries…) ou médicale (radiothérapie, chimiothérapie…). La consommation d'eau contaminée au mercure ou des poissons les plus facilement intoxiqués est à éviter ou à réduire (marlin, requin, thon rouge…).

Un régime alimentaire particulier : état de cétose…

Une hypoglycémie, un changement de régime alimentaire et plus particulièrement un régime restrictif (Keto, monodiètes…) peuvent provoquer une haleine ferrique. L'odeur qui se dégage de la bouche pourra également s'apparenter à une odeur de dissolvant pour vernis à ongles (acétone). L'halitose temporaire est même l'un des symptômes qui permet de confirmer que vous avez atteint le fameux état de cétose. Il s'agit d'un état métabolique pendant lequel votre corps puise son énergie dans vos cellules graisseuses après avoir épuisé vos réserves de glycogène (les glucides stockés dans le foie et les muscles). Un mauvais goût dans la bouche est dû aux corps cétoniques qui se forment dans l'organisme en marge de la dégradation des graisses.

Une pathologie spécifique

Vous allez voir que la liste des pathologies pouvant modifier les récepteurs du goût et induire un goût métallique dans la bouche est longue. Comme mentionné, inutile de vous alarmer trop vite car ces causes sont les plus rares et seront bien évidemment détectées et traitées par un professionnel de santé.

• Le diabète (type I ou II) qui touche environ 5,3 % des Français provoque des troubles du goût qui sont souvent associés à une bouche sèche et à une soif intense.
• La migraine, une pathologie chronique qui handicape environ 20 % de la population adulte (3 femmes pour 1 homme selon la Fédération Française de neurologie).
• L'insuffisance rénale peut provoquer une modification des goûts et une sensation métallique est d'ailleurs l'un des nombreux signes de la maladie. Ce goût met en exergue un excès d’acide urique.
• Les affections du système nerveux central (CNS) ou troubles neurologiques. Maladie d’Alzheimer, Parkinson, démences diverses, Sclérose en plaques, Paralysie de Bell, AVC, tumeur, blessure… affectent les récepteurs cérébraux du goût.
• Le syndrome de Gougerot-Sjögren, un trouble immunitaire qui diminue entre autres la production de salive.
• La Maladie de Crohn, une maladie inflammatoire chronique de l'intestin (MICI) qui touche 1 français sur 1000. Il faut noter que 10 à 15 % des MICI touchent des enfants, d'où l'importance de rester vigilant à leur ressenti des goûts et pour les plus petits à leur haleine.
• Le reflux gastro-œsophagien (RGO), une affection liée à une défaillance du muscle obstructeur du tube digestif qui provoque la remontée d'une partie du contenu de l'estomac dans l'œsophage. Il est souvent la cause d'une sensation de goût métallique ou acide.
• Pathologies de la vésicule biliaire comme la rétention biliaire, les calculs ou les tumeurs de la zone.

Goût métallique ou goût amer : comment s'en débarrasser ?

Pour éliminer cette sensation désagréable de bouche métallique, il faudra en découvrir la cause profonde. Chacun pourra noter les circonstances ou autres éventuels symptômes complémentaires et consulter un professionnel de santé suivant la gravité.

• Vous avez une plaie qui saigne ? Pensez à faire des bains de bouche pour atténuer le goût métallique en attendant votre rendez-vous chez le dentiste ou contactez un parodontiste si vous suspectez une GUNA.
• Vous avez également mal aux oreilles ou à la gorge et éventuellement de la fièvre ? Consultez un ORL, il saura diagnostiquer l'infection et vous proposer un traitement adapté.
• Vous avez un goût de fer persistent mais aucun symptôme spécifique ? Et s'il s'agissait d'une carence en vitamines ou des effets secondaires d'un médicament ? Évitez de faire de l'automédication et ne prenez surtout pas l'initiative d'arrêter un traitement prescrit par un professionnel de santé. Contactez votre médecin afin qu'il change éventuellement le dosage ou substitue le produit incriminé par un autre. Le retour à une sensation gustative normale revient généralement quelques semaines après l'arrêt de la prise du médicament.
• Vous fumez beaucoup ? Commencez par réduire votre consommation de nicotine et si le goût de métal persiste consultez un médecin, la cause est peut-être différente.

Et s'il s'agit d'une pathologie, seul un traitement médical adapté permettra d'en venir à bout. Votre bouche retrouvera progressivement sa fraîcheur au fil des jours, semaines ou mois.
Pour vous débarrasser d'un goût de métal, n'oubliez surtout pas de commencer par améliorer votre routine de soins bucco-dentaire (brossage de la langue, fil dentaire, bain de bouche régulier…). Pour remédier temporairement au désagrément, vous pouvez également utiliser un spray buccal anti halitose ou mâcher des gommes sans sucre enrichies en fluorure de sodium. Privilégiez également les ustensiles en bois, en verre, en silicone ou en plastique et oubliez les contenants ou plats en fer, les couverts en métal, l'argenterie ou les pichets en cuivre. Autre réflexe à avoir, buvez beaucoup d'eau tout au long de la journée afin de veiller à toujours rester hydratés, le goût métallique sera atténué au moins momentanément.

Dysgueusie : pourquoi ne faut-il pas la négliger ?

Un goût métallique qui arrive de manière exceptionnelle avec un certain type d'alimentation ou la prise d'un nouveau médicament, n'a rien de vraiment alarmant. Au contraire, ne le négligez surtout pas et consultez un professionnel de santé s'il est persistant ou qu'il vous handicape au quotidien. Au-delà du fait qu'il puisse être lié à une maladie, les conséquences sur le long terme peuvent être importantes. Comment prendre plaisir à manger avec une dysgueusie ? Comment apprécier un bon déjeuner alors que chaque aliment a un goût de métal ? Cette sensation désagréable est souvent suivie d'une diminution d'appétit, voire d'une perte totale de l'envie de se nourrir qui peut mener à l'anorexie. Le patient s'enfonce alors dans une sphère infernale qui va l'entraîner vers une dégradation de son état physique général (amaigrissement, faiblesse…) et psychologique (dépression, anxiété…) entraînant un isolement social.

Goût de métal : examens spécifiques

Les enjeux d'une halitose (métallique ou non) étant tellement importants, les professionnels de santé mettent tout en œuvre pour en connaître l'origine afin de la traiter le plus rapidement possible. Ils commencent généralement par un interrogatoire poussé du patient afin d'orienter les éventuels examens cliniques qui permettront de confirmer la cause. Il pourra s'agir de bilans sanguins, d'investigations par imagerie médicale (radio, échographies, IRM…) ou d'analyses microbiologiques ciblées. Dans les cas de troubles sévères du goût, le spécialiste pourra même s'appuyer sur des examens particuliers comme :

• Une gustométrie chimique pour détecter le seuil du goût sur la langue. Il s'agit d'une exploration du ressenti des 4 saveurs élémentaires (sucré, salé, amère et acide) à différentes concentrations.
• Une électro gustométrie qui permet de déclencher une impression gustative par des micros décharges électriques sur différentes zones de la langue.
• Une topographie endo buccale visant à déterminer si toutes les papilles gustatives de la langue sont atteintes par cette sensation de goût métallique. S'il s'agit d'une zone spécifique, le médecin pourra éventuellement demander une biopsie pour extraire et étudier plus en détail quelques bourgeons du goût.

Vous l'avez compris, pour savoir pourquoi vous avez un goût de métal dans la bouche, commencez par écouter votre corps et par en prendre soin. Si les symptômes persistent ou que les causes vous semblent plus inquiétantes, consultez un spécialiste sans attendre.